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Le faussaire Bojarski

Sans doute l’un des plus grands faussaires de billets de tous les temps, Czeslaw Bojarski était surnommé « le Cézanne de la fausse monnaie ». Ingénieur-chercheur, né en Pologne, il arrive en France en 1940 où il démarre son activité de faux-monnayage. Les faux billets de Bojarski suscitent aujourd’hui l’engouement des collectionneurs. Explorons la vie et les exploits du faussaire et découvrons son impact dans le monde de la numismatique.

Qui est Czeslaw Bojarski ?

Czeslaw Bojarski est né en 1912 en Pologne. Il y obtient un diplôme d’ingénieur-architecte à l’université. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est appelé par l’armée et part en Hongrie, en Yougoslavie, puis il débarque à Marseille en 1940.

Son parcours fût semé d’embûches avant qu’il ne réussisse son activité de faussaire. À l’issue de la guerre, il se lance dans différentes aventures professionnelles. Il tente de se faire une place dans l’industrie de la matière plastique, revient à la mécanique, dépose des brevets, sans véritable réussite, ni épanouissement. En 1948, il se marie avec une Française et obtient la nationalité.

Il commence le faux-monnayage au même moment, dans sa maison de Bobigny. Il y installe un atelier dans une pièce vide, puis dans une annexe au fond du jardin. Il disposait d’un outillage et de matériel complet, pour la plupart créés par lui-même. Il fabriquait, entre autres, sa pâte à papier, en mélangeant du papier à cigarettes et du calque dans des proportions bien définies.

Le faussaire Bojarski

À partir de 1951, la Banque de France prend connaissance de la circulation de fausses coupures de billets de 1 000 francs “bleus” Minerve et Hercule Type 1945, dans toute la France et, en particulier sur le marché parisien. Le travail est d’une qualité irréprochable. Les copies de billets sont bien réalisées et indétectables au premier coup d’œil.

En 1958, apparaît une nouvelle contrefaçon. Cette fois, celle du billet de 5000 Francs “terre et mer”.

1000 francs Minerve et Hercule

Deux années plus tard, la Banque de France découvre, cette fois, des faux billets de 100 Nouveaux Francs Bonaparte Type 1959.

Ces trois copies de billets portent les mêmes défauts en signature et surtout, elles apparaissent toutes les trois de manière dispersée. Aucun doute, c’est notre homme. Le faussaire Bojarski finit par être attrapé par la justice en 1964 et condamné à 20 ans de prison. Mais, comment-a-t-il pu éviter de tomber dans les mailles du filet, pendant près de 16 ans ?

Un faussaire discret

Bojarski affirme avoir procédé entièrement seul à la production de l’ensemble de ces contrefaçons. Pour vérifier cela, les experts Ceccaldi et Cogniard organisent des reconstitutions en juillet 1964. Elles confirment que le faussaire travaillait bien seul.

D’accord, mais comment écoulait-il ses billets ? Il a procédé de la même manière pour les trois types de faux billets. En fait, il les dépensait, un par un, en achetant des objets, principalement à Paris et dans les régions où il partait en vacances. Il allait même jusqu’à glisser un unique faux-billet dans chaque liasse, pour assurer sa discrétion. Le seul extra qu’il s’autorisa fut l’acquisition de son pavillon de Montgeron en 1960.

Le premier billet écoulé de 100 nouveaux francs Bonaparte aurait été utilisé pour acheter son dîner de Noël dans une boucherie de Bobigny. Il consacrait beaucoup de temps à ces opérations. Un vrai travail de fourmi et bien peu lucratif !

Une erreur fatale

Jusqu’au jour où une liasse de 10 faux billets de 100 Nouveaux Francs “Bonaparte” est trouvée par la Banque de France. Cette liasse de coupures avait été remise à l’administration des PTT pour l’achat de bons du Trésor. Le cachet sur le timbre permis à la Banque de France de remonter jusqu’au bureau de poste du XVIIe arrondissement de Paris. Suite aux entretiens avec tous les employés, elle met la main sur un dénommé Alexis Chouvaloff. Au fil de l’enquête, il s’avère que Chouvaloff récupère les billets auprès de son beau-frère Antoine Dowgierd. Ces derniers dénoncent rapidement leur vieil ami et compatriote, le faussaire Ceslaw Bojarski, qui leur avait vendu ces billets.

La perquisition chez Bojarski dévoile un coffre-fort avec 72 millions d’Anciens Francs de bons du Trésor. Les agents de police découvrent également une trappe qui mène à l’atelier de fabrication de la fausse monnaie, aménagé dans la cave de sa maison de Montgeron.

Les faux billets de 100 Nouveaux Francs Bonaparte Type 1959

Le phénomène Bojarski est probablement unique dans l’histoire du faux monnayage. De façon exceptionnelle, la Banque de France a procédé en 1964 au remboursement des faux billets à tout propriétaire qui venait se présenter.

Sans doute le plus grand chef-d’œuvre du faussaire, les billets de 100 Nouveaux Francs Bonaparte sont d’une telle valeur artistique, qu’ils sont désormais recherchés et collectionnés par de nombreux numismates.

On connaît désormais précisément les six défauts des billets de Bojarski, non visibles à l’œil nu :

  • La feuille verte, au-dessus du 1, n’est pas tout à fait fermée ;
  • Les cheveux de Bonaparte sont plus fournis que sur l’original ;
  • Le chiffre 100 NF est plus près de la marge de 4/10 de millimètre ;
  • Il manque une branche à la première étoile orange située en haut à gauche ;
  • Les fleurs et les fruits de la frise du haut sont hachurés moins finement ;
  • Le filigrane est plus large et plus flou que l’authentique.

Le faux-billet de 100 Nouveaux Francs Bonaparte de Bojarski atteint des sommes considérables dans les ventes aux enchères. En 2008, l’un d’entre eux a été adjugé à plus de 5 500 euros. Plus récemment, un lot de deux faux billets a été mis en vente à un prix de départ de 6 500 euros. Recherchés dans le monde entier, les billets Bojarski accèdent au rang d’œuvre d’art chez les numismates.

La numismatique est largement sujette à la tromperie et la vigilance reste nécessaire pour protéger l’intégrité de la monnaie. Cependant, les faux billets de Bojarski sont le témoignage de l’ambivalence de la discipline, un billet Bojarski vaut désormais beaucoup plus que sa valeur numéraire.

Nous proposons régulièrement des papiers-monnaies de ce type en vente sur notre boutique.

Sources :
Le monde
RTL
Wikipédia
Bourse du collectionneur
Fayette édition
Le parisien
cgb.fr

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