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Carl Wilhelm Becker, numismate et faussaire
L’activité de faussaire est aussi ancienne que la création de la monnaie. On connaît d’ailleurs des exemples d’imitations de pièces datant du VIIe siècle avant J.-C. À l’époque, ces modèles étaient davantage réalisés par souci d’économie que pour des raisons criminelles. Les contrefaçons de collection, quant à elle, sont plus récentes et ont bel et bien pour but de tromper les numismates. Le faussaire Carl Wilhelm Becker s’est plu à cette activité pendant une grande partie de sa vie. Retour sur le parcours de cet homme.
Les débuts professionnels de Carl Wilhelm Becker
Becker est né en Allemagne, à Spire, en 1772 et meurt en 1830. En tant que fils de marchand de vins, rien ne le prédestinait à devenir l’un des faussaires les plus talentueux de l’histoire de la numismatique. Il commença d’abord sa carrière dans l’entreprise familiale ; son père l’envoya d’ailleurs se former à Bordeaux. À 23 ans, il épouse Maria Catharina Tremelius avec laquelle il ouvre une boutique de vins à Francfort-sur-le-Main. Puis, ils changent d’activité et montent une entreprise de draps à Mannheim, qui fait finalement faillite en 1803.
Sa passion pour la numismatique et le déclic
En parallèle, Carl Wilhelm Becker s’était toujours intéressé à la sculpture et à la numismatique, ses véritables passions. Pendant son temps libre, il dessinait des vieilles pièces de monnaie antiques et s’amusait à les reproduire. À Munich, il se forme à la fabrication de matrices en acier gravé et décide finalement de quitter le secteur du commerce en s’installant en tant que marchand d’art et d’antiquités. C’est sans doute à ce moment-là qu’il eut l’idée de devenir faussaire. Becker acheta une pièce d’or romaine de l’empereur Commode à un baron. Il s’aperçut ensuite que c’était une escroquerie et que la pièce était fausse. Lorsqu’il se plaignit auprès de ce dernier, le voleur lui rétorqua qu’il aurait dû se renseigner et qu’il s’était fait avoir à cause de sa propre ignorance. Vexé, il entreprit de nombreuses recherches et s’exerça pour pouvoir tromper à son tour. Il commença alors à vendre ses propres réalisations.
Son activité de faussaire
Il voyagea en Europe, en Suisse et en Italie où il sympathisa avec des numismates de renom. Grâce à toutes ses connaissances, sa notoriété grandit rapidement et il attira l’attention de grands collectionneurs. Il était considéré comme érudit et connaisseur de pièces et cette réputation lui permit de vendre régulièrement des monnaies contrefaites, qu’il produisait discrètement à Offenbach.
Il étudiait soigneusement l’original, puis gravait le dessin à la main. Il travaillait ensuite à partir de copies faites avec des moulages en plâtre. Becker imitait les gestes et le rendu de l’Antiquité, en frappant ses pièces à coups de marteau. Pour leur donner un aspect vieilli, il les transportait en carriole dans des sacs remplis de graisse et de limaille de fer.
Une fois ses pièces produites, Becker les commercialisait, grâce à un réseau d’agents et de contacts commerciaux dans toute l’Europe. Dans certains cas, elles étaient vendues en tant que copies modernes, mais la grande majorité du temps, elles étaient présentées comme authentiques. Tout au long de sa carrière, Becker a vendu des monnaies à de grands collectionneurs à travers le continent, comme Goethe ou à des riches princes d’Europe comme le Prince Charles d’Isembourg, et même à des musées. Il faut imaginer qu’à l’époque, l’étude scientifique de la monnaie ancienne était très peu développée.
La renommée de Carl Wilhelm Becker
Cependant, tout le monde n’était pas dupe. Peu à peu, le doute s’installa chez certains connaisseurs qui le soupçonnaient de vendre ses propres fabrications à la place de pièces authentiques. Il attira quelques critiques comme celle du numismate italien Domenico Sestini qui l’avait démasqué. Carl Wilhem Becker se défendit alors, en vantant ses talents d’imitateur de monnaies anciennes, mais en niant totalement l’intention d’arnaquer ses clients. Selon lui, il leur fournissait des copies, revendiquées comme telles, dont les originaux étaient inabordables. Cependant, les notes trouvées plus tard, dans son journal, montrent que ce n’était pas tout à fait vrai et que certaines de ses œuvres ont bel et bien été vendues au prix fort.
Après sa mort, son travail de faussaire resta dans les annales. L’Allgemeine Deutsche Biographie, évoque son « talent éminent, d’une grande dextérité manuelle et d’une diligence de fer ». Il apparaît dans le catalogue des faux d’Anton von Steinbüchel en 1836, puis en 1843 dans celui de Moritz Pinder et dans le dictionnaire manuel de la numismatique de 1909 d’Heinrich Halke. Le Cohen affirme que ces faux présentaient la particularité de mélanger les avers et les revers de différentes monnaies, ce qui rend aujourd’hui l’exercice d’identification facile. George Hill explora 360 exemples de fausses pièces grecques fabriquées par Becker dans un ouvrage publié en 1924. Toutes ces parutions participèrent à asseoir sa réputation de grand faussaire dans le monde numismatique.
Les contrefaçons de Becker sont aujourd’hui appréciées des collectionneurs aux mêmes titres que les originaux. Il est dorénavant reconnu pour son talent en tant que graveur. Pour voir une des plus grandes collections de son œuvre, il faudra aller découvrir la Maison de l’histoire d’Offenbach qui rassemble 550 pièces réalisées par Carl Wilhelm Becker.
Notre boutique propose régulièrement des pièces de Becker. N’hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements.
Sources :
Deutsche Biographie
Wikipedia
Monnaie romaine
Numismatico Digital
Musée national suisse