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Le gros tournois

Le gros tournois est le nom donné à une pièce de monnaie d’argent française. Créée par Saint Louis en 1266, elle devient rapidement populaire et sera l’une des monnaies les plus imitées au Moyen-âge. Produite et utilisée en grande quantité, elle est frappée jusqu’au XVIe siècle. Elle fait aujourd’hui partie des pièces les plus renommées de la numismatique médiévale.

La création du gros tournois

Autrement appelée le gros d’argent, la pièce est fabriquée par le roi Louis IX (Saint Louis) au retour de la Septième croisade (1248-1254). C’est la raison pour laquelle certains historiens affirment que le roi s’est inspiré des monnaies arabes. Pourtant, la création de ce type de monnaie est loin d’être un cas isolé en Europe. Au XIIIe siècle l’économie est en plein essor et aux quatre coins du continent, de nouvelles monnaies voient le jour : le florin à Florence, les matapans à Venise, les aquilini grossi du Tyrol, les groats anglais ou encore les Groschen de Bohême.

Saint Louis n’échappe pas au souhait de soutenir la reprise économique du XIIIe siècle et désire plus que tout unifier le royaume. Né à Poissy en 1214 et mort à Tunis en 1270, il est le fils de Louis VIII et de Blanche de Castille qui devient régente en 1226, alors que saint Louis n’a que 12 ans. Dès son accession au trône à sa majorité, Saint Louis cherche un accord avec les souverains voisins et les grands seigneurs. Catholique très croyant, il participe à deux croisades, la septième et la huitième. À l’intérieur du royaume, il souhaite affirmer son autorité en imposant ses lois et sa justice.

C’est la raison pour laquelle, sur ordonnance du 12 juillet 1266, il ordonne la frappe d’une monnaie d’argent matérialisant le sou de compte. Exclusivement frappée dans l’atelier royal, elle doit supplanter les deniers et les oboles, en cours depuis la réforme carolingienne. L’objectif est de créer une monnaie plus forte pour le commerce et d’unifier l’ensemble des entités féodales.

Les caractéristiques du gros tournois

Une pièce d’argent

Le gros tournois de saint Louis était taillé à 58 au marc de masse, soit une masse de 4,22 grammes d’argent. Frappé dans la cité de Tours, il valait donc un sou ou douze deniers tournois. Au fur et à mesure du temps, la qualité du gros fit hausser son cours : sous Philippe le Bel, il valait jusqu’à 15 deniers. Restauré par Charles V, abandonné sous Charles VI, puis repris par Charles VII pour une valeur de 30 deniers, le gros tournois finit par être remplacé par le teston au XVIe siècle.

Un nom qui en dit long

En 2018, Philippe Bodet menait cependant dans un article une réflexion sur la teneur en argent fin du gros tournois. Pour lui, c’est peut-être sa valeur qui lui aurait donné son nom :

« Quant à son titre réel en argent avancé par toutes les sources, à savoir 958/1000, un doute s’installe néanmoins en étudiant les conditions de l’époque et les procédés d’extraction et de titrage de l’argent. Cette étude, vulgarisée à dessein, montre que le titre réel serait plus proche de 938/1000 voir moins. Hasard ou contingence technique, mais un tel titre donne au gros tournois une masse d’argent fin équivalent à un poids de … un gros, ancienne unité de masse valant un peu plus de 3.8 gr. Serait-ce l’origine de cette appellation ou est-ce la survivance de l’expression médiévale «gros denier» ? »1.

Une monnaie royale

Au niveau du style, le gros tournois reprend celui du denier tournois.

Son avers est constitué d’une croix entourée de douze lettres LVDOVICVS REX, la titulature du roi. Sur le bord, une inscription en latin est apposée « BNDICTV:SIT:NOME:DNI:NRI:DEI:IHV:XPI » ce qui veut dire « béni soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ ».

On trouve également sur le revers une inscription latine de douze lettres : TVRONVS CIVIS, le nom de l’atelier de Tours. Au centre de la pièce, le châtel tournois est représenté de façon stylisée. Autour de lui, gravite une bordure de douze fleurs de lys, symbole de la royauté biblique qui souligne la dévotion du Roi. Selon certains, le nombre de lys était là pour certifier le taux de change de douze deniers, mais selon Philippe Baudet « cette théorie dogmatiquement admise reste cependant à démontrer formellement, car elle est contredite par des pratiques postérieures à Louis IX ; tel le gros blanc sous Jean II le Bon, avec treize fleurs de lys qui s’échangeait contre 10 deniers ».

Toujours est-il que l’héritage du gros tournois de Louis IX restera omniprésent dans la numismatique française. Les rois suivants chercheront souvent à imiter la monnaie de Saint Louis et encore aujourd’hui, elle tient une place de choix dans la numismatique. Retrouvez-la régulièrement sur notre boutique.

Sources :
Jean Dérens dans L’encyclopédie Universalis
David Knoblauch, Numismatique, « Zoom sur le Gros Tournois, témoin du renouveau monétaire médiéval »
Larousse
Wikipedia
1Philippe Bodet, Academia, « Le gros tournois de St Louis… réflexions »

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