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Le Trésor de l’abbaye de Saint-Wandrille
L’abbaye de Rives-en-seine, située dans le département normand de la Seine-Maritime, a été le théâtre, en 1954, d’une incroyable chasse aux trésors. Orchestré par le père Dom Donaint, un jeu de scouts s’est transformé en une véritable quête et a révélé un des plus grands trésors d’abbaye du XXe siècle, celui que l’on nomme Saint-Wandrille.
L’abbaye de Saint-Wandrille de Fontenelle
Fondée au VIIe siècle par le prêtre Wandrille et destinée à accueillir une communauté de moines de la congrégation de Solesmes, l’abbaye de Saint-Wandrille de Fontenelle est considérée comme une des premières abbayes bénédictines de Normandie. De grands abbés se sont succédés dans ce lieu majestueux et magique, situé dans les boucles de la Seine, à environ 35 km de Rouen. Il est encore aujourd’hui habité par des moines.
La découverte du trésor de l’abbaye de Saint-Wandrille
Le 11 mars 1954, les louveteaux de l’ancienne commune de Saint-Wandrille se rassemblent comme chaque dimanche sur les lieux. Ce jour-là, le prêtre Dom Donaint organise une gigantesque chasse au trésor en pleine nature sur le thème des fleurs.
Les enfants, âgés de 12 ou 13 ans, s’en donnent à cœur joie. À tel point que l’un deux, Jean-Pierre Mazé, propose aux autres de débusquer un vrai trésor. L’idée lui vient lorsqu’il tombe sur un trou dans le mur de la clôture, l’espace qui délimite la vie quotidienne et les activités des moines. Le trou ne recèle rien d’intéressant, à part quelques noisettes, qui appartiennent certainement à un rat des champs.
Jean-Pierre et ses copains ne baissent pas les bras. Ils longent la clôture en observant chaque pierre jusqu’à la chapelle Saint-Saturnin. Ils la contournent et vérifient le mur de l’autre côté. Tout à coup, Jean-Pierre aperçoit une pierre un peu différente des autres, taillée d’un signe mystérieux. Les enfants n’en reviennent pas. Jacques Blot, l’un d’entre eux, se met à la desceller et trouve, au fond du trou, une urne en terre cuite. D’une vingtaine de centimètres, elle est recouverte d’une feuille de plomb et contient des pièces de monnaie en or. Les apprentis chercheurs s’empressent d’en informer le père Donaint et continuent leur fouille. À quelques mètres de la première trouvaille, Pierre Lemousu et Daniel Blot découvrent un autre dessin, derrière lequel se trouve une autre urne, puis une troisième !
Des Louis d’or par dizaines
Le lendemain, le procès-verbal est effectué et l’huissier séquestre le trésor de l’abbaye de Saint-Wandrille cinq jours après sa découverte. L’inventaire fait état de 501 pièces Louis XV, des Louis d’or aux lunettes et Louis d’or au bandeau, similaires aux monnaies emblématiques du Trésor de la rue Mouffetard. Les trois pots contenaient exactement le même nombre de pièces soit 167.
Le trésor est divisé en deux. Une part va à l’abbaye, en tant que propriétaire des murs, et l’autre part est destinée aux parents des curieux. Le partage est défini comme tel :
- 231 Louis d’or aux lunettes et 19 Louis d’or au bandeau
- 230 Louis d’or aux lunettes et 20 Louis d’or au bandeau
Un tirage au sort est effectué le 17 octobre 1954 pour répartir les lots.
L’abbaye décide de vendre sa part et de conserver uniquement une pièce de monnaie de chaque type. Le 3 mars 1955, 304 monnaies Louis XV sont proposées aux enchères à la salle Drouot (un des parents s’est ajouté au projet). Le commissaire-priseur Maurice Rheims accompagné de l’expert Emile Bourgey se chargent de la vente publique. Véritable succès, elle atteint la somme de 3 310 000 francs. Malheureux ou heureux hasard, les communs de l’abbaye brûlent quatre mois plus tard, l’argent servira donc à leur restauration.
Le mystère du trésor de l’abbaye de Saint-Wandrille
L’histoire fait le tour de la presse. De nombreux badauds viennent se promener aux alentours de l’abbaye de Saint-Wandrille. D’où provient ce trésor ? Qui l’a enfoui et pourquoi ? La pièce la plus récente datant de 1748, le magot a donc été dissimulé pendant plus de deux siècles. Rien n’indique les raisons de cette cachette, la région étant en paix à ce moment-là.
Les trésors de Saint-Wandrille se trouvaient sous une pierre à l’extérieur du mur de l’enceinte de l’abbaye, comme si son riche propriétaire comptait sur la protection de l’église. Il avait certainement marqué les pierres pour revenir les chercher plus tard. Sur l’une d’elle, un cercle pointé est dessiné, symbole de l’or.
La légende continue. On raconte même que Jean-Pierre avait trouvé sous le premier pot un parchemin qui indiquait 28 cachettes, mais on ne sut jamais ce qu’il advint de ce document.
Un quatrième pot en terre cuite aurait d’ailleurs été découvert dans les années 80, enterré sous terre cette fois. On retrouva un trou et une pierre, mais il n’est resté aucune trace ni du pot, ni du chercheur…
En 1996, Didier Audinot, l’historien spécialiste des trésors, écrivait dans son Manuel de détection et de chasse aux trésors : « plus tard, en 1989 ou 1990, plus de trente ans après la trouvaille des trois pots, un prospecteur avisé, dont le nom ne sera jamais connu, repéra une quatrième pierre à signe qui n’avait jamais été aperçue jusqu’alors (…). Le trou alors pratiqué par ce chercheur des années 1980 est encore visible : il est parti sans le reboucher ».
Le mystère reste entier. Reste-t-il 24 autres trésors à découvrir à Saint-Wandrille ?
Sources :
Trésors, légendes et réalités, Sabine Bourgey, 1996
Site web de Sabine Bourgey
Abbaye de Saint-Wandrille
La toile scoute
Le blog des chercheurs de trésors